CUBA

12 mars : destination Cuba
Après le changement réussi de la bague hydrolube, au prix fort ; la seule sortie du bateau aura coûté 6 fois plus cher qu’à Saint-Brieuc, et 3 fois plus qu’à Pointe-à-Pitre, (mais bon nous avons ainsi l’impression de participer à la réparation des dégâts du cyclone ….), départ grand largue à 14h pour tourner la pointe nord de l’île Great Camanoe.

Après une séquence de 8-10 nœuds de vent d’Est, pendant la nuit, pétole et deux heures de moteur. Et la courroie du pilote automatique casse : plus de pilote, plus de blocage de barre, et nous resterons au moteur en nous relayant jusqu’à 14 heures. Cela nous rappelle notre première traversée du Golfe de Gascogne : c’est fatigant. Puis nous longeons les côtes de Porto Rico en passant à une dizaine de milles de San Juan puis nous remontons progressivement vers le nord.
Le jeudi 14 mars est une journée sous spi avec un vent faible à une vitesse de 4 nœuds. Les côtes de la République Dominicaine se dévoilent au loin, trois dauphins magnifiques nous saluent par une paire de sauts et s’en vont.
Vendredi 15 mars, à 6 nœuds, nous longeons Silver Bank, récif corallien presque affleurant.
Quelques empannages dans la nuit du 15 au 16 avec un vent qui a forci à 20 nœuds et nous filons vers notre destination. En milieu de journée, les reliefs d’Haïti se dévoilent à nous, avec la mythique île de la Tortue, célèbre repère de flibustiers et boucaniers. A l’approche du Cap du Mole, nous nous engageons dans le Windward passage entre Haïti et Cuba, pas très rassurant, Windward est inscrit en gras sur notre bouée de sauvetage … Le vent forcit, 20 à 25 nœuds, les vagues se forment, trois, quatre mètres par le travers. Elusive Butterfly assure !
Dimanche 17 mars, à l’approche des côtes cubaines, le vent forcit encore à plus de 30 nœuds, les vagues se creusent et forment des déferlantes qui viennent doucher le tableau arrière. Contents de notre cockpit central, nous n’avons pas les pieds dans l’eau. Nous nous rapprochons de la côte pour trouver des conditions plus calmes. Trop près ! Notre premier contact avec Cuba sera une voix venant de la base américaine de la Guantanamo qui somme Elusive Butterfly de s’éloigner immédiatement à plus de trois miles de la côte. Nous obtempérons immédiatement sous les conseils avisés de Jean-Yves.
Pour entrer à Santiago après le lever du soleil, nous menons une course de lenteur au moteur toute la nuit à 2 ou 3 nœuds avec un vent quasiment nul.
Lundi 18 mars, après quelques vains appels sur le canal 16 pour demander l’autorisation, comme il se doit, de rentrer dans le chenal, nous embouquons la vaste ria défendue par le fort El Morro et au fond de laquelle s’est installée la Ville de Santiago. La petite marina se situe juste après l’entrée. Elle se limite à un failli ponton en béton où deux officiels nous font signe de mouiller l’ancre à proximité. Il faut dire que nous sommes suivis par une goélette de 30 mètres, navire école hollandais qui accueille une trentaine d’adolescents, et qu’ils font accoster au ponton. 30 minutes plus tard, un homme des Tropas Guardafronteras et une femme du ministère de la Santé, présentée en tant que médecin, s’installent dans le carré que nous avions pris soin de ranger après nos 6 jours agités de traversée. Après la prise de notre température avec un thermomètre électronique frontal, quelques questions de routine et d’autres qui nous surprennent : armes, argent liquide, drogues mais aussi le nombre d’œufs à bord, de litres de lait, de kilo de viande. Le garde frontière nous demande des précisions sur nos 5 dernières escales et notre destination finale après quoi il nous prie de lui servir à boire, une bière, 50 cl de préférence : il est 9h30 du matin. Marie sort le saucisson qui a un franc succès. Nous causons de la pluie, du beau temps, des enfant, photos à l’appui et nous avons l’autorisation d’abaisser le pavillon Q jaune (quarantaine). Nos visiteurs retournent à quai après nous avoir invités à aller finir les formalités au bureau où nous accueille la photo de Fidel Castro.

A 13h tout est en ordre, visas obtenus et finalement nous n’avons pas passé plus de temps qu’ailleurs pour la clairance contrairement à tout ce que nous avions pu lire. Il est vrai que les jeunes français arrivés le lendemain, militaire en dispo avec les cheveux longs et la barbe, propriétaire d’un drone ont eu plus de soucis. L’autre couple sur un petit bateau, Armagnac de 1970, se sont vus fouiller jusqu’au contenu de l’aspirateur à pile à la recherche de quelques traces d’herbe compromettantes.
Mardi 19 mars, nous nous rendons à Santiago-centre par la navette fluviale de 6h25 où prennent place une cinquantaine d’habitués avec qui nous débarquons 40 mn plus tard sur le Malecon, vaste esplanade piétonne où trônent les lettres monumentales CUBA.

Nous ferons ce trajet trois jours de suite pour découvrir la ville, faire un peu d’avitaillement, enfin ce que nous réussissons à trouver et surtout nous « recueillir » sur la tombe de Fidel Castro, mais aussi sur celle de Compay Segundo.

La tombe de Fidel Castro…

Et le mausolée de José Marti
Et surtout Compay Segundo…
Nous retrouvons Erwan et Anne-Marie en haut de la rue Obispo. Il viennent d’arriver de La Havane pour passer quelques jours avec nous et faire la traversée Santiago à Cienfuegos.


Anne-Marie, la terrienne, a fait le baptême de l’eau trois jours et trois nuits, elle qui avait dû ne mettre les pieds sur un voilier que deux fois. Tout s’est bien passé grâce à une petite pause dans un lagon des Jardins de la Reine, où Erwan est allé nager avec les barracudas (pas trop longtemps quand même…)


A peine arrivés à Cienfuegos et les formalités faites, nous filons dès le lendemain avec un taxi à La Havane, Erwan et Anne-Marie prennent l’avion le 26.
Ensuite retour à Cienfuegos et nous préparons la prochaine étape. L’approvisionnement ne va pas être une mince affaire ! Pas de beurre, pas de cacahuètes, pas de pâté, pas de thé, le café en paquet de 5 ou 10 kilos, pas de laitage, pas de fromage hormis la barre carrée de Gouda de 80 cm de long et la charcuterie se résumant à des agglomérats de viande et de graisse en gros rouleau sous cellophane. Pas beaucoup de fruits et légumes et les oeufs aux abonnés absents. Va falloir pêcher !

Pas le choix…

ou RIEN


Ce qui nous a le plus marqué :

  • La file d’attente que nous avons faite pour acheter les cartes d’une heure d’accès Internet, vendues par lot de trois maximum par personne avec présentation du passeport – Internet n’est accessible aux cubains depuis seulement une petite année ; depuis 4 mois, parait-il ils peuvent même avoir un abonnement téléphonique avec accès Internet. La carte coûte 1 CUC. Et pourtant tous les collégiens vus plus tard au musée de la révolution à La Havane possèdent un portable !
  • Les personnels dans les bureaux ont tous et toutes les mêmes jupes et pantalons beiges ou bleus confectionnés dans les ateliers locaux.
  • Les écoliers portent tous le même uniforme.
  • Et un peu de gymnastique pour les vieux, et les plus jeunes !
  • Il faut d’abord maîtriser l’utilisation de deux monnaies : les pesos CUC (1 CUC vaut à peu près 1 euro ou 1 dollar américain) et les pesos monnaie nationale, 25 pour 1 CUC. La plupart des restaurants affichent des prix en CUC (on peut déjeuner pour environ 10 CUC) mais le vendeur de hamburger sur la rue se fait payer en pesos nationaux (10 pesos le hamburger soit 0,40 euros). La place au Grand Théâtre est à 30 CUC pour les étrangers mais 30 pesos pour les nationaux, il en va de même pour les musées. Mais l’électroménager, les voitures et de manière générale tous les produits importés sont en CUC y compris pour les nationaux…
  • Le salaire d’un serveur de grand Hôtel de la Havane, propriété de l’Etat, avec 30 ans d’ancienneté est de 20 CUC par mois quand les chambres sont à 200 CUC la nuit. Mais Julio profite d’un appartement confortable qu’il a le droit d’occuper parce que sa tante l’habitait avant la révolution. Il nous a accueillis dans sa casa particular pour 30 CUC par nuitée.
  • Blablacar fonctionne sans connexion : les voyageurs se postent sur le bord de la route en brandissant un billet.
  • Quand les bus sont insuffisants, ils sont complétés par les camions bus.
  • Les taxis collectifs fonctionnent super bien (par téléphone) et concurrencent ainsi les cars dédiés aux touristes qu’il faut réserver à l’avance en allant au guichet (un seul à La Havane).
  • Les Cubains qui ont la télé regardent clandestinement les programmes de TV de Miami, strictement interdits (1000 CUC d’amende !)
  • Les orchestres se déchainent dans tous les restaurants et bars, ne comptez pas faire un tête à tête de préparation de la suite du voyage : il risque d’y avoir des non-entendus !
  • Et puis Miquel, le jeune pédaleur d’un bicitaxi de Santiago rencontré la veille, avec qui Jean-Yves a longuement causé en espagnol et a finalement donné rendez-vous au lendemain … pour s’en débarrasser gentiment ; eh bien Miquel nous a retrouvés le lendemain avec un grand sourire et nous a véhiculés pendant toute la matinée : le cimetière, la place de la révolution, le supermarché, le centre ville ; le tout pour 5 CUC. Merci Miquel à qui nous avons demandé l’autorisation de publier la photo sur Internet.
  • Les Jardins de la Reine, îlots, magnifiques lagons, cayos interdits pour lesquels Jean-Yves a dû signer un papier au départ de Santiago pour ne pas s’y arrêter mais à la question posée au douanier où pouvons nous quand même faire une pause, la réponse fut : n’importe où !
  • Des immeubles parfaitement restaurés et entretenus jouxtent des ruines dans la Vieja Habana. Conseil d’un Cubain de toujours : marche toujours au milieu de la rue car il y a souvent des chutes de morceaux de façades sur les trottoirs.
  • Les vielles voitures américaines d’avant la Révolution ne sont pas que des taxis pour touristes, loin de là. Il y a bien quelques Cadillac Eldorado roses pour balader les amateurs de cartes postales mais pour la plupart les vieilles voitures sont celles de particuliers qui les entretiennent tant bien que mal car il est tout simplement impossible de s’en acheter une neuve.
  • Des librairies quasi dédiées aux ouvrages en rapport avec la révolution ou des manuels scolaires. Nous avons cherché un dictionnaire français espagnol. Notre seule trouvaille : une édition Larousse de 1950, couverture cartonnée et reliure désossée …pour 10 euros. Nous avons capitulé.
  • Mais la pharmacie de la Vieja Habana est superbe!
  • Résumé de la situation par un cubain : il n’y a rien et tout est cher. Mais pourtant chacun semble manger à sa faim avec les tickets de rationnement. Enfin, il y a quelques jours, panique à la Havane : plus un œuf sur le marché …
  • Les grands axes en 2X3 voies quasi déserts, la voie de droite est utilisée principalement par des carrioles tirées par un cheval. Les endroits les plus animés sont les arrêts des bus reliant les grandes villes.
  • L’incroyable Casa Fuster, « façon Gaudi », et inspirée de Picasso et Niki de Saint Phalle déborde dans tout un quartier de la périphérie de La Havane : un lieu magique !
  • La Vigia, ancienne demeure d’Hemingway, dont il fit don au peuple cubain en 1960 au lendemain de la révolution, avant de retourner dans l’Idaho où il se suicida quelques mois après. Au sommet de la tour, avec vue sur la baie, le bureau où il écrivit « Le Vieil homme et la mer ».
  • Chaque ville possède sa majestueuse place de la Révolution.
Avec l’incontournable statue de José Marti
  • Le Musée de la Révolution de La Havane est assez décevant, les informations se mêlent à la propagande et au fétichisme : les lunettes que Fidel portait lors de tel discours, la vedette Granma dans laquelle il entra à Cuba en 1956 enchâssée dans un « Mausolée » monumental, etc …
Mais Cienfuegos était avec nous (regardez bien le billet de 20 pesos!)
  • Mais avec tout cela, nous n’avons rencontré que de la gentillesse dans tous nos contacts avec les Cubains, franchement très étonnés, et le mot est faible, que nous venions de France à deux sur un petit bateau à voiles !

Prochaine étape : Panama et la préparation de la « grande traversée » vers la Polynésie.

4 commentaires sur “CUBA

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  1. Bonjour Marie-Laure et Jean-Yves,
    effectivement, il me sembl(ait) que la misère serait moins pénible au soleil..
    O fortunatos nimium, sua bona norint, agricolas..!
    Bises azuréennes
    JLoic

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