De Madère au Cap Vert

3 décembre

Jean-Yves était dans les starting blocks, à Madère depuis trois semaines. Nous quittons Quinta do Lorde pour un premier mouillage à Baixo Doca sur l’île de Deserta Grande. Nous nous étions munis de l’autorisation de l’Insituto das florestas e conservaçao da naturaleza que Joana AGUIAR, la chef de port, avait demandée pour nous. 

Escale roulante aux Ilhas Desertas 

La petite anse de Doca, ouverte au sud, est protégée de la houle par une avancée de cailloux, sur laquelle elle vient déferler. Trois bouées sont à disposition au pied d’une impressionnante falaise volcanique de 200 mètres de haut. Une des bouées était occupée par une petite barque de trois pêcheurs d’un certain âge ou d’un âge certain à bord. Ils ont quitté le mouillage juste avant le petit matin.

Avec un vent de sud même modéré, le mouillage est agité et la nuit que nous y passons aussi. Pour un amarinage en douceur souhaité, ce fut raté ! 

Donc, départ le lendemain matin sous ciel couvert et vent faible et pas de baleines que nous devions surveiller pour ne pas risquer de les percuter, pas d’oiseaux, pas de bateaux, pas de poissons ….. Ilhas Desertas !

Un court et nécessaire repos aux Canaries (la Palma – Santa Cruz)

Les courbatures habituelles du deuxième et troisième jours se font sentir et nous décidons de faire une petite pause à Santa Cruz de la Palma avec ses typiques et historiques balcons équipés de toilettes maintenant reliées au tout-à-l’égout.

Nous avions pensé que cet arrêt serait accessoirement utile pour obtenir les papiers tamponnés de sortie du territoire européen. Tout un programme. Jean-Yves, grand administratif devant l’éternel, a réussi à faire ouvrir, un jour férié, le bureau de la Policia Portuaria en passant par le bureau de la Policia Nacional en ville. On nous avait expliqué que, sans ce tampon, nous ne pourrions pas faire escale au Cap Vert. Et pour finir, on ne nous l’a pas demandé à Mindelo au cours des formalités. Il faut dire qu’ils ont dû avoir un peu pitié de nous car nous étions bien fatigués !

Les 6 jours et 7 nuits n’ont pas été de tout repos dès le départ de Santa Cruz. A la nuit tombée, noire, sans lune ni étoiles, le vent s’est levé à 20, 25 puis 30 noeuds jusqu’à près de 40 noeuds. Les 50 m2 de génois dehors, Elusive Butterfly, voilier lourd et tranquille de croisière, s’est tapé un petit surf historique de 16,5 noeuds sur le fond avec Jean-Yves à la barre, qui a fini par appeler Marie pour enrouler le génois en attendant que ça passe.


Avant le coup de vent quand le coucher de soleil enflamme la pointe de Fuenventura

Il n’y a de lumières que celles des instruments de navigation et du plancton phosphorescent réveillé par les germes d’écume qui jaillissent de l’étrave.

Le 7 décembre au matin, nous sortons des vents et dévents de l’archipel des Canaries, entre El Hierro et La Gomera.

Le vent s’établit à 15 noeuds Est et nous pointons à 7,5 noeuds au 210 vers le Cap Vert. Des vagues courtes de 1,5 mètres nous prennent par le travers et nous ballotent. Tout déplacement sur le bateau est un exercice physique assez complet ; l’énergie dépensée à préparer un riz pilaf se récupère grâce à un doublement de la ration et nous payons de quelques sommes la nuit précédente qui fut quasi sans sommeil. 

8 décembre, 2h30, Vent toujours Est de 20 noeuds. Nous ne faisons pas mieux qu’un cap au 195, un peu trop à l’Est. Bételgeuse dans la constellation d’Orion et Aldébaran dans les Hyades sont à gauche du mât. En fin de journée, plusieurs coups de vent à plus de 30 noeuds sous les nuages nous malmènent et énervent un peu la mer.

9 décembre, 2h, passage du tropique du Cancer. Nuit fraîche : combinaison polaire, veste de quart, bonnet, gants, grosses chaussettes dans les bottes ! Vivent les tropiques !

Fin du dernier quart au petit matin…

10 décembre, 2h30, nuit beaucoup plus calme que la précédente. Sur l’horizon, les éclats du phare de Nouadhibou. Une belle étoile filante traverse la Grande Ourse qui occupe majestueusement le ciel sur notre arrière en position quasi verticale à cette heure et cette latitude. Le canal 16 de la VHF, en principe dédié à la veille et à la sécurité, est incroyablement encombré par des conversations, invectives, morceaux de musique et un étrange  » alihhaa » exhalé toutes les 10 ou 20 minutes en un souffle puissant comme lorsque l’on expulse de l’air du fond de la poitrine après une bouchée trop épicée.

11 décembre 7h

Ne brille plus dans le ciel que Vénus, quand l’aube a éteint les étoiles. Un pétrel nous accompagne en virevoltant autour du bateau. Est-ce le même depuis deux jours et deux nuits ? Le pétrel n’a pas de maison…

Il faut maintenant gérer la fin de l’étape pour arriver de jour à Mindelo, le fonctionnement des feux étant aléatoire et la présence d’épaves nécessitant une vigilance particulière à l’entrée du port. Nos calculs nous annoncent une arrivée à 3H du matin, il faut donc ralentir l’allure en réduisant la toile : trinquette et réduction de la grand voile à 4 ou 5 m2 et nous filons encore à 6 nds.

Des nuées de poissons volants nous croisent. Combien de dizaines de milliers d’années ont-ils mis à développer cette technique pour échapper à leurs prédateurs ? Mais les frégates, qui ont aussi évolué, les attrapent en vol…

12 décembre

2H30 À l’approche de l’archipel du Cap Vert, un cargo est en route de collision. Nous nous installons une vingtaine de minutes à la cape pour le laisser passer. Nuit rouleuse, nous alternons le sommeil tant bien que mal. Et la cuve de gazole de 300 kg s’est descellée et se déplace au gré du roulis… Calage d’urgence, pourvu que ça tienne jusqu’à l’arrivée ! Un peu angoissant – c’est un euphémisme – de penser que la cuve puisse translater dans le carré !

Au petit matin, nous passons entre Sao Vicente et Santao Antao, une quinzaine de poissons volants se sont échoués sur le pont. Et l’effet Venturi réputé pousser le vent à 40 ou 50 nds nous a épargné.

Arrivée impeccable à Mindelo à 9H.

7 commentaires sur “De Madère au Cap Vert

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  1. coucou aux chanceux qui beneficient de chaudes temperatures et de soleil pour naviguer tout le temps sans tirer de bords au près.
    Si mes calcul sont bons, vous n’êtes plus qu’à 5 , 6 jours des antilles ( à condition de rester en surf à 16,5 nds)
    Profitez bien de votre escale pour recuperer.
    On pense à vous avec un soupçon de jalousie.
    evy michel

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  2. Apres les « fraicheurs » tropicales et la fatigue vous allez sans doute pouvoir vous rechauffer et reprendre de l ‘energie au Cap vert .. …Bises . Francois .

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  3. Et ben ! Ce n’est pas vraiment une croisière mais bel et bien une épreuve sportive…Merci de nous faire partager si joliment vos aventures 😎
    Amitiés
    Geneviève

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  4. Coucou,
    après quelques recherches dans nos mails, nous avons finalement trouver l’adresse du blog.
    tout semble bien se passer (sauf la cuve de fioul, ce qui doit être un brin stressant).
    Vous passez donc la fin d’année en mer. Alors bonnes fêtes de fin d’année
    Profitez bien.
    On vous embrasse.

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